Sous l’effet de la crise sanitaire COVID-19, la croissance de l’économie nationale aurait ralenti à +1,1% et s’établirait à -1,8% respectivement aux premier et deuxième trimestres 2020, au lieu de +1,9% et +2,1% en l’absence de l’effet COVID-19.
Synthèse de la note du haut-commissariat au Plan sur la situation des principaux indicateurs économiques estimés pour le premier trimestre et les prévisions pour le deuxième trimestre 2020.
La croissance de la demande étrangère adressée au Maroc se serait infléchie de 3,5% au premier trimestre 2020, en variation annuelle, au lieu de 1,3% prévu en l’absence de l’effet de la crise du COVID-19, pâtissant du repli du commerce mondial et de la baisse de l'activité de nos principaux partenaires commerciaux.
Dans ces conditions, les exportations en valeur se seraient repliées de 22,8%, au lieu d’une augmentation de 1,1%. L’automobile, premier secteur exportateur (27% des exportations totales), aurait le plus régressé.
Le segment de la construction automobile, déjà en ralentissement en 2019 suite à l'atonie qui touche l'industrie automobile mondiale et européenne, aurait été impacté par la baisse de la production locale en raison de l'arrêt des activités des sites de Renault et PSA et de la baisse de la demande en provenance de l'Europe.
Près de 97% des voitures nationales exportées vers le monde sont destinées au marché européen, notamment aux marchés français, espagnol, allemand et italien, fortement touchés par la crise sanitaire.
Dans le secteur de l'habillement, qui représente 11% des exportations totales, les exportations de la confection et de la bonneterie auraient été bridées par une baisse des commandes auprès des donneurs d'ordre en provenance de l'Europe.
Au premier trimestre 2020, les exportations en valeur des produits du textile auraient reculé de 4,3%, en variation annuelle.
Les exportations des phosphates et dérivés (17% du total exporté en valeur) auraient, quant à elles, subi le recul de la demande étrangère qui leur est adressée et la baisse de leurs cours mondiaux.
Au premier trimestre 2020, les exportations du phosphate et de ses dérivés se seraient repliées de 40,1% en valeur.
En revanche, certains produits des secteurs agricole et de la pêche auraient plutôt profité d'une demande étrangère plus importante, notamment pour les légumes et les fruits frais et agrumes, en raison du ralentissement des productions espagnoles, françaises et italiennes en manque de main-d'œuvre sur les exploitations agricoles.
Pour leur part, les importations auraient régressé de 4,8% au premier trimestre 2020, en variation annuelle, au lieu de 0,9% prévu initialement, en raison notamment du recul de la facture énergétique qui représente entre 13% et 18% du total importé en valeur.
La tendance baissière observée actuellement des cours mondiaux de pétrole brut aurait favorisé un repli à l'international des prix des produits raffinés comme le gas-oil et le fuel-oil (50% des produits énergétiques importés).
A l'inverse, la facture alimentaire se serait creusée davantage par la hausse des importations des céréales et des aliments de bétail.
Au total, le déficit de la balance commerciale se serait creusé sensiblement (+23,8%) au premier trimestre 2020, sous l’effet de la baisse plus conséquente des exportations par rapport aux importations.
Cette situation se serait traduite par une baisse du taux de couverture de 11,6 points pour atteindre 49,7%.
Décélération de la demande intérieure
La consommation des ménages aurait ralenti, au premier trimestre 2020, affichant une hausse de 1,2%, en variation annuelle. Cette décélération aurait, principalement, concerné les dépenses des ménages en biens durables, en habillement, en transport et tourisme.
La consommation des administrations publiques se serait, à l’inverse, affermie de 3,2%, dans le sillage de la hausse des dépenses de fonctionnement.
Quant à l’investissement, son évolution aurait été sensiblement tempérée par le ralentissement de l’investissement en équipement industriel et le renforcement de l’atonie de l’investissement immobilier.
En variation annuelle, la croissance de l’investissement se serait limitée à 1,2% au deuxième trimestre 2020.
Tenant en compte des effets de la crise COVID-19, la croissance économique n’aurait pas dépassé 1,1% au premier trimestre 2020 au lieu de 1,9%.
Cet abaissement serait attribuable au ralentissement des activités secondaires, dont le rythme d’évolution serait passé à 0,5%, au lieu de 1,6% sans effet du COVID-19.
Les activités tertiaires auraient affiché une réduction prononcée de leur rythme de croissance, s’établissant à 2,7% seulement au lieu de 3,1%. L’essentiel de ce retournement aurait été lié à la dégradation des perspectives de croissance de l’économie mondiale, ainsi qu’aux mesures de confinement en vigueur à partir du 20 mars 2020.
Baisse de la croissance au deuxième trimestre 2020
Sous l’effet de la pandémie du COVID-19, l'environnement international serait plus pénalisant pour l'économie nationale qu’au trimestre précédent.
Avec la hausse des craintes de récession et l’accentuation des tensions protectionnistes, la croissance et les échanges mondiaux devraient fléchir davantage.
Les pressions inflationnistes devraient rester contenues et seraient tributaires de l'évolution des cours internationaux des produits énergétiques et alimentaires et de la poursuite de la situation excédentaire de l'offre par rapport à la demande mondiale en énergie.
Dans ce contexte, la demande étrangère adressée au Maroc devrait s’infléchir de 6%, au deuxième trimestre 2020, en variation annuelle, pénalisée par le fléchissement des importations, surtout européennes, qui défavoriseraient les industries orientées vers l’export.
En plus du choc externe, l'économie nationale devrait faire face, également, à une baisse de la demande interne qui affecterait l’activité de la plupart des secteurs productifs.
Le PIB devrait enregistrer une régression de 1,8% au deuxième trimestre 2020, en variation annuelle.
Cette contraction serait principalement le fait d’une baisse de près de la moitié du rythme de croissance de la valeur ajoutée du secteur tertiaire, suite à un arrêt presque total dans les activités de restauration et d'hébergement, d’une réduction de 60% de l'activité dans le transport et de 22% dans le commerce, en comparaison avec notre scénario de référence.
Au ralentissement des services, serait combinée une contraction de 0,5% la valeur ajoutée du secteur secondaire.
Les industries manufacturières seraient les plus affectées par le repli de la demande étrangère adressée au Maroc, avec la chute de la production des secteurs de l’automobile, du textile et des industries électriques.
Dans le même temps, les activités des mines subiraient le repli de la demande des industries chimiques, dans le sillage de la forte régression des exportations de l’acide phosphorique.
Quant aux activités agricoles, leur repli se limiterait à 2,9%, en rythme annuel, grâce notamment à l’amélioration des perspectives de croissance des cultures printanières, favorisée par le retour quasi-général des précipitations à fin mars et la stabilisation des prix des aliments de bétail.
Les effets de cette impulsion climatique devraient toutefois s’effriter, face à un prolongement des restrictions de circulation des travailleurs saisonniers et au maintien des mesures strictes de contrôle imposées par les pays européens au-delà du mois d’avril 2020, notamment pour les productions périssables comme les fruits et les légumes.
Au total, les effets du confinement au cours du mois d'avril 2020 devraient amputer la croissance du PIB de 3,8 points au deuxième trimestre 2020 par rapport au premier scénario, soit l'équivalent d'une perte d'environ 10,9 milliards de DH, au lieu de 4,1 milliards de DH un trimestre auparavant.
Les services devraient y contribuer le plus (-2,49 points), suivis des industries manufacturières (-0,39 point).
Il est à souligner que ces prévisions restent sujettes à des révisions plus ou moins importantes au fur et à mesure de la publication de nouvelles données, dans un contexte empreint de fortes incertitudes quant à la durée de la crise sanitaire, aux effets néfastes sur l'activité économique des diverses mesures de confinement et de restriction aux déplacements, mais également quant à l'ampleur de l'impact des programmes de dépenses et des plans de soutien à l'économie nationale.