Le déficit en logements au Maroc est passé de 840.000 à 500.000 unités, et tout porte à croire que nous nous acheminerons vers l’objectif engagé de 400.000 unités d’ici la fin de l’année.C'est ce qu'a indiqué le ministre de l'Habitat et de la Politique de la ville, Mohamed Nabil Benabdallah, qui intervenait jeudi lors d’un débat sur la «Relance de l’immobilier au Maroc», organisé dans le cadre du Cycle de conférences du Conseil national de l’habitat.
Les promoteurs boudent le logement "moyen"
Trois études ont été initiées par le ministère de l’Habitat, dont une auprès des bénéficiaires des opérations de recasement de ménages de bidonvilles. Il en découle un taux de satisfaction supérieur à 90% et une amélioration de près de 27% du taux de pauvreté. Une autre étude estime la demande en logements à plus de 1,5 million d’unités, ce qui correspond, selon le ministre de tutelle, à une demande de nouvelle nature (superficie plus élevée, centre-ville, etc).
Les mesures introduites pour encourager le locatif et le logement de la classe moyenne n’ont pas donné les résultats escomptés, dixit Benabdallah. Même si le prix du logement «moyen» a été augmenté de 6.000 à 7.200 DH le mètre carré, les promoteurs ne s’y intéressent pas et veulent plutôt des exonérations fiscales.
La crise exclue, plutôt un effet palier
Si le ministre de tutelle pense qu’il y a un tassement de l’immobilier et non pas une crise, le PDG de CIH Bank, Ahmed Rahhou, préfère, quant à lui, évoquer un «effet palier» et un problème d’adaptation entre l’offre et la demande. Si le crédit aux particuliers continue de croître à un rythme normal, celui octroyé aux promoteurs immobiliers accuse une baisse de 10%, de 70 à 60 milliards de DH. Ces derniers seraient en train de liquider leurs stocks, explique Rahhou, excluant le scénario d’une bulle, puisque le stock en logements reste inférieur à la demande disponible.
Le PDG de CIH Bank estime que l’offre ne correspond pas à la nature de la demande en termes de standing, de choix de quartier ou de ville. Cette situation, conclut Rahhou, soulève la problématique de la gestion territoriale, outre la question des capacités de financement, notamment chez les jeunes.
Le foncier cher et inaccessible !
Ce climat d’attentisme caractérisant le secteur de l’immobilier, notamment du côté des investisseurs, malgré son rendement jugé élevé, est lié au niveau de risque qu’il présente, ainsi qu’à la complexité des procédures administratives et à la cherté du foncier, souligne Rahhou. Au-delà de 1.000 DH/mètre carré, le foncier perd son attractivité pour le logement social. Si on attaque le problème de l’accès au foncier et si on fluidifie les procédures, les promoteurs auront tendance à accepter une prime de risque couplée à un niveau de rendement raisonnable.
Le locatif peut-il sauver le secteur ?
Nous sommes en train de saturer notre système immobilier, basé essentiellement sur la propriété, constate Rahhou. Pour lui, le salut viendra du locatif. Pour dynamiser ce marché, il invite à revoir, voire alléger les dispositions encadrant notamment le logement social, en particulier celle interdisant la location des appartements de ce segment, ou encore celle interdisant leur vente dans un délai de huit ans. Ce qui n’a pas empêché, rappelle Rahhou, la location de ces unités de se développer en toute illégalité. Adossé à un rendement variant entre 6 et 10%, le locatif peut drainer une grande masse d’épargne (800 milliards de DH de dépôts), d’autant plus que le rendement des comptes sur carnet reste inférieur à 2%. Encore faut-il régler les rapports entre les propriétaires et les locataires (actuellement en faveur de ces derniers). Enfin, conclut Rahhou, la gestion des résidences et des ensembles immobiliers laisse à désirer et impose des syndics professionnels qui veillent sur l’amélioration des prestations et sur le paiement des droits.■