L’Association des Centraliens Supélec du Maroc (ACSM) a organisé, les 10 et 11 novembre 2024 à Casablanca, la 8ème édition du Forum des Centraliens Supélec, sous le thème : «Maroc 2035 : Quelles contributions du secteur privé ?».
Cet événement a réuni des décideurs, des chefs d’entreprise et des acteurs économiques pour examiner le rôle crucial du secteur privé dans la croissance et la modernisation du Royaume, en particulier dans les domaines de l’innovation technologique et du développement durable.
Cette rencontre a également mis en lumière les leviers que l'État pourrait actionner pour libérer le potentiel d’investissement et stimuler le dynamisme entrepreneurial.
«La Commission spéciale sur le Nouveau modèle de développement (NMD), qui avait reçu nos propositions et contributions, souligne l’importance d’une économie productive, diversifiée et créatrice de valeur ajoutée et d’emplois de qualité.
Car, en dépit des investissements massifs et des politiques publiques, l’enjeu de l’emploi reste critique avec un taux de chômage de 13% et un taux de jeunes en situation de NEET de 25%. Le NMD préconise un changement de paradigme pour que l’investissement soit plus productif en termes d’emplois et de valeur», a relevé Jalal Charaf, président de l’ACSM.
Et de poursuivre que cette édition du Forum est l’occasion de proposer des stratégies pour que l’investissement privé passe d’une part d’un tiers à deux tiers de l’investissement au Maroc, en alignement avec les préconisations du NMD.
Dans son discours d’ouverture, le ministre de l’Industrie et du Commerce, Ryad Mezzour, a de son côté insisté sur la nécessité de repositionner le Maroc sur la scène mondiale tout en renforçant sa souveraineté économique.
Selon lui, bien que le Maroc se soit préparé depuis une trentaine d’années à s’intégrer dans la mondialisation par le développement massif des infrastructures et l’accueil d’industries stratégiques, il est maintenant temps de se recentrer sur la force économique nationale et l’autonomie.
«Aujourd’hui, les règles du jeu ont changé. Nous voulons récupérer notre force économique, nous voulons récupérer notre souveraineté», a souligné le ministre.
Face aux défis actuels, le gouvernement a établi une feuille de route en cinq priorités. Celle-ci repose sur le renforcement de la compétitivité, l’accroissement de la part de l’investissement privé, la simplification des procédures administratives pour encourager l’entrepreneuriat, la transformation du système éducatif ainsi que la généralisation de la protection sociale.
Par rapport à ce dernier point, Ryad Mezzour a précisé que cette généralisation est non seulement un impératif de dignité, mais également un moteur pour libérer les énergies créatrices.
«La protection sociale permet de libérer les énergies et l’esprit d’initiative de nos concitoyens. En assurant un filet de sécurité sociale pour tous, le Maroc souhaite offrir à ses citoyens un environnement stable et propice à l’innovation», a-t-il affirmé.
Pour sa part, Hicham Sabiry, secrétaire d’Etat chargé de l’Emploi, a souligné l’urgence de dynamiser le marché du travail.
«Le droit au travail demeure aujourd'hui un obstacle majeur au progrès de notre société. Les statistiques dévoilées récemment par le CESE montrent que 18 % des grèves sont dues à la non-déclaration à la CNSS.
Peut-on vraiment envisager un Maroc moderne où des salariés sont encore privés de cette protection sociale de base ? Ces grèves engendrent des pertes de temps considérables, fragilisent le climat social et mettent en péril la stabilité de notre économie», regrette-t-il.
Mohamed Fikrat, président de la Commission investissement et compétitivité de la CGEM, a quant à lui abordé les priorités stratégiques pour atteindre l’objectif de créer une économie résiliente d'ici 2035.
« La construction d’une économie diversifiée et innovante, le capital humain, l’inclusivité des territoires et la transition vers des modèles durables sont essentiels. Le secteur privé doit être au cœur de cette transformation », a-t-il insisté.
Pour y parvenir, il a souligné la nécessité d’une montée en gamme technologique, d’une amélioration continue de la compétitivité, et de politiques publiques visant à soutenir des secteurs stratégiques.
En effet, le Maroc dispose d’un potentiel d’investissement considérable, soutenu par des secteurs en pleine croissance. Des domaines comme l'économie bleue, le digital, l'offshoring et l'artisanat sont des opportunités de création de valeur et d’emplois. Cependant, le pays peine encore à mobiliser suffisamment d’investissements privés pour pleinement exploiter ces secteurs.
A cet égard, Ahmed Reda Chami, président du Conseil économique, social et environnemental (CESE), estime que l’État peut jouer un rôle décisif en matière de dynamisation de l’entrepreneuriat et de d’attraction des investissements privés.
«La simplification des procédures administratives, la lutte contre la corruption et la réforme du système judiciaire sont des leviers fondamentaux pour encourager l’entrepreneuriat et renforcer la confiance des investisseurs», précise-t-il.
Les ateliers organisés lors de la première journée de cette 8ème édition du Forum des Centraliens Supélec ont donné lieu à une série de recommandations pour encourager l’investissement privé.
Celles-ci s’articulent autour de quatre axes principaux. Tout d’abord, l’élaboration de stratégies d’investissement ciblées et co-construites avec les acteurs du secteur privé et public, pour s'assurer qu’elles répondent aux priorités nationales.
Ensuite, la mise en place d’incitations sectorielles spécifiques pour encourager des investissements dans les industries porteuses.
En troisième lieu, un soutien accru à l’investissement privé dans les territoires pour promouvoir un développement équilibré.
Enfin, l’instauration d’une gouvernance solide et de mécanismes de suivi qui permettent de mesurer l’impact des politiques d’investissement et d’ajuster les stratégies en temps réel.
Meryem Ait Ouaanna