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VTC : Abdelouafi Laftit sort le carton rouge

VTC : Abdelouafi Laftit sort le carton rouge

A quelques mois de la CAN 2025, le ministère de l’Intérieur rappelle que les VTC restent illégaux. Mais dans les rues, une autre réalité s’impose : applications de transport, chauffeurs non agréés et usagers cohabitent avec des taxis excédés.

 

Par D. William

Le 7  juillet  2025, Abdelouafi  Laftit, ministre de l’Intérieur, a remis les pendules à l’heure : «utiliser des applications de transport pour véhiculer des personnes sans autorisation légale est illégal».

Point final. Les contrevenants s’exposent à des sanctions, saisies de véhicules, voire poursuites. Ce rappel intervient au cœur d’un conflit latent mais explosif entre chauffeurs de taxi, VTC non agréés et autorités déterminées à faire appliquer la loi.

Cette fermeté officielle n’est pas anodine. Elle fait suite à plusieurs incidents, dont la dernière rendue publique concerne une violente agression commise récemment à Rabat par un chauffeur affilié à la plateforme de transport InDrive sur deux étudiantes. Il faut dire que le malaise dans le secteur du transport urbain est palpable, entretenu par le flou juridique, les tensions et les attentes croissantes des usagers.

D’un côté, les taxis traditionnels sont malmenés par l’évolution des technologies et cette concurrence jugée déloyale, d’autant qu’ils sont eux-mêmes soumis à des règles strictes, avec des autorisations parfois chèrement acquises et une pression économique constante. Raison pour laquelle ils multiplient les protestations parfois musclées, allant même jusqu’à s’ériger en justiciers, ce qui, selon l’Intérieur, «est illégal et passible de poursuites».

De l’autre, des milliers de chauffeurs collaborant avec des plateformes numériques proposent des services appréciés des usagers, mais en dehors du cadre légal. Entre les deux, il y a une administration prise en étau, sommée de garantir l’ordre, la sécurité, mais également la modernisation du secteur. En cela, le discours de fermeté de Laftit amène à se poser une question : peut-on se contenter de réprimer ce que l’on refuse encore de réguler clairement ?

Le paradoxe est en effet saisissant. Les autorités, en filigrane, reconnaissent elles-mêmes que ces services numériques existent, se développent et répondent à une demande réelle. Mais elles continuent de s’appuyer sur des textes datés, notamment la loi 5205 et le dahir n° 1.63.260 (1963).

«Quiconque veut exploiter un service public de transports routiers en commun de voyageurs par véhicules automobiles, doit être marocain ou ressortissant d’un Etat avec lequel le Maroc a passé un accord de libre-échange, dûment ratifié et publié au «Bulletin officiel», être personnellement agréé à cet effet et obtenir, en outre, pour chacun des véhicules affectés au service, une carte d'autorisation spéciale», stipule en l’occurrence l’article 5 du dahir.

Ainsi, les textes de loi en vigueur ne distinguent ni ne prévoient le cas des plateformes numériques. Lesquelles opèrent aujourd’hui dans une illégalité assumée : quasi-clandestins et sans cadre clair. D’ailleurs, ce flou juridique et l’opposition des syndicats de taxis ont été à l’origine de l’arrêt des activités d’Uber au Maroc en 2018.

 

La CAN 2025 et le Mondial 2030 pour changer la donne

A l’heure où le Royaume se prépare à accueillir la Coupe d’Afrique des nations (décembre 2025–janvier 2026) et la Coupe du Monde de football en 2030, maintenir cette zone grise n’est plus une option.

Le Maroc va recevoir des millions de visiteurs. Et parmi les toutes premières attentes des touristes, il y a le transport. Sécurisé. Accessible. Moderne. Dans ce contexte, les VTC apparaissent comme une composante indispensable d’un système de transport urbain performant. Les estimations parlent de plus de 80.000 conducteurs VTC au Maroc, en rivalité directe avec les 77.000 taxis traditionnels, petits et grands.

Et quand bien même les services de transport via application ne sont utilisés que par 18% des Marocains, selon l’enquête l’Economiste – Sunergia publiée en juin dernier, ils séduisent cependant de plus en plus. Leur utilisation grandissante tient, entre autres, au tarif annoncé à l’avance, à une course géolocalisée et à un système de notation qui oblige quelque part les chauffeurs à respecter les bases du service client.

Dans ce contexte, la régulation de ce secteur devient donc urgente, tant il est vrai que le transport intelligent est une réalité irréversible. Licences, assurances, carte professionnelle, contrôle des antécédents et obligations fiscales : tous les éléments d’un écosystème régulé doivent être définis. En janvier dernier, Laftit avait affirmé que son département travaillait sur une étude pour organiser et encadrer ces plateformes numériques.

«Des solutions seront mises en place pour organiser ces services et garantir aux citoyens une offre de transport claire et encadrée», avait-il promis. En attendant, sur le terrain, rien n’a encore changé. Et au-delà de la récurrence des incidents entre chauffeurs de taxis et de VTC, d’un côté, ou entre usagers et conducteurs de VTC, de l’autre, qui risquent un jour de virer au drame, les enjeux socioéconomiques liés à cette problématique sont loin d’être négligeables.

L’absence d’encadrement génère un manque à gagner fiscal pour l’Etat et fragilise aussi les conducteurs euxmêmes, qui exercent sans couverture, sans statut clair et donc sans protection. 

 

 

 

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