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Remaniement ministériel : L’heure d’un grand coup de balai ?

Remaniement ministériel : L’heure d’un grand coup de balai ?

Le gouvernement Akhannouch se trouve aujourd’hui confronté à une crise de confiance grandissante. Entre un taux de chômage des jeunes qui continue d’exploser, la problématique de l’émigration clandestine et les inondations, l’Exécutif semble dépassé par l’ampleur des défis, se murant dans un silence assourdissant. Alors que les critiques fusent de toutes parts, un remaniement ministériel semble devenir une nécessité, à deux ans de la fin de cette législature.

 

Par D. William

Cela fait un moment que l'idée d'un remaniement ministériel flotte dans l'air. Entre les murmures qui aliment les discussions dans les salons feutrés et la colère des citoyens excédés, la question brûle sur toutes les lèvres : le gouvernement Akhannouch est-il encore à la hauteur des défis actuels ? La réponse, pour beaucoup, semble évidente : il est temps de changer de cap !

Pour autant, nous ne parlons pas d’un remaniement cosmétique, de ceux où l’on remplace deux ou trois visages pour faire croire à une refonte en profondeur. Non, ce qui semble de plus en plus urgent, c’est une véritable remise en question au sein de l’Exécutif. Et, pourquoi pas, un grand coup de balai. Après tout, cela pourrait donner un nouvel élan à un gouvernement qui peine à convaincre sur plusieurs fronts.

Et ces fronts ne manquent pas : émigration clandestine, chômage des jeunes, gestion des crises climatiques… La liste est longue. Et les frustrations tout aussi nombreuses.

 

L'émigration clandestine en orbite

Commençons par un sujet qui cristallise l’attention internationale : l'émigration clandestine. La petite ville côtière de Fnideq a été, il y a quelques jours, le théâtre d’événements dramatiques, après la diffusion d’appels anonymes sur les réseaux sociaux incitant à une immigration massive.

Située à quelques kilomètres du préside occupé de Sebta, elle est ainsi devenue, en quelques heures, un symbole de la détresse de jeunes marocains prêts à tout pour fuir leur pays et chercher fortune ailleurs, même au prix de leur vie.

Au-delà du drame humain, ces événements révèlent une crise sociale très profonde : le désespoir de toute une génération qui se sent délaissée. Et pourtant, face à cette tragédie, qu'a fait le gouvernement ? Ou plutôt, qu'a dit le chef du gouvernement ? Rien. Silence radio. Pas de discours fédérateur ni d'intervention pour rassurer, afin de montrer qu’il est à l'écoute de cette détresse.

Cette absence de communication renforce forcément ce sentiment de déphasage entre l'Exécutif et le peuple. La crise migratoire est étroitement liée à la situation alarmante du chômage des jeunes au Maroc.

Ce problème persistant est l'un des principaux défis, pour ne pas dire le principal échec du gouvernement Akhannouch qui, pourtant, multiplie les discours d’autosatisfaction sur ses réalisations. Selon les dernières statistiques du haut-commissariat au Plan (HCP), le chômage des jeunes atteint en effet des sommets inquiétants  : au second trimestre 2024, il a connu une hausse de 2,5 points parmi ceux âgés de 15 à 24 ans, passant de 33,6% à 36,1%, et de 1,6 point parmi les personnes âgées de 25 à 34 ans, passant de 19,8 à 21,4%.

Dans les régions rurales, où les opportunités sont encore plus rares, beaucoup de jeunes finissent par céder à la tentation de l’émigration illégale. Le manque d'emplois qualifiés, la précarité de ceux disponibles, ainsi que l’inadéquation entre la formation des jeunes diplômés et les besoins du marché du travail sont des problèmes structurels qui n'ont toujours pas été résolus.

C’est pourquoi, d’ailleurs, le taux de chômage des diplômés se situe à 19,4% au second trimestre 2024.

Les initiatives comme le programme Awrach ou Forsa n’y ont rien changé. Les jeunes peinent de plus en plus à s’insérer dans le marché du travail, mais également à trouver des emplois stables et bien rémunérés. Et dire qu’en 2021, le chef du gouvernement, Aziz Akhannouch, avait promis, durant sa mandature, de créer 1.000.000 d’emplois net, soit 200.000 par an !

Pratiquement 3 ans plus tard, le chômage s’est au contraire aggravé. Entre 2021 et 2022, l’économie nationale a perdu au total 24.000 postes d’emploi.

Le taux de chômage au niveau national s’était certes amélioré, passant de 12,3% à 11,8% d’une année à l’autre, mais cela était dû, comme nous l’avions déjà écrit dans ces colonnes, à un effet rattrapage après l’hécatombe subie par le Royaume entre 2020 et 2021 (durant la pandémie), où l’économie nationale avait perdu des dizaines de milliers d’emplois.

Entre 2022 et 2023, le taux de chômage s’est aggravé, passant de 11,8% à 13%, avec 157.000 postes d’emploi perdus. Il se situe, au second trimestre 2024, à 13,1% au niveau national. Et comme si cela ne suffisait pas, la nature semble également vouloir rappeler que la gouvernance d’un pays ne se limite pas à des chiffres ou à des discours.

Les inondations meurtrières qui ont frappé le sud-est du Royaume récemment en sont la preuve. Selon les dernières estimations, elles ont fait une vingtaine de 20 morts et plusieurs disparus, sans compter des dommages matériels importants.

Là encore, ce qui a le plus frappé les citoyens, c’est l'absence de prise de parole officielle du chef du gouvernement dans les heures ou jours qui ont suivi ces catastrophes. Pas un mot à l’égard de la population. Même pas une visite symbolique dans les régions sinistrées.

 

Un gouvernement un brin passif

Les critiques contre l’Exécutif se multiplient de plus en plus. Et pas seulement dans les cercles d’opposition dont les voix sont moins inaudibles. L’opinion publique, surtout, s’émeut de la posture du gouvernement. De sa passivité. De cette déconnexion avec la collectivité.

D’où, peut-être, la nécessité d’un changement d’équipe ministérielle pour donner plus de jus à ce gouvernement qui, visiblement, semble être actuellement dans sa zone de confort, alors que plusieurs réformes et chantiers structurants doivent être menés à moyen terme.

Ce remaniement ne doit cependant pas être un simple jeu de chaises musicales où l’on remplace les noms sur les portes des bureaux. Ce dont le Maroc a besoin aujourd'hui, c'est d’un renouvellement stratégique. Avec de nouvelles idées. Des idées novatrices.

Et peut-être même de nouvelles façons de penser. Parce que la jeunesse marocaine attend, surtout, des solutions concrètes à ses problèmes, pas des promesses creuses pour pacifier les intelligences rebelles.

Si un remaniement devait avoir lieu, il devrait s’inscrire dans cette logique. Que ce soit dans la lutte contre l’émigration clandestine, dans la création d'emplois pour les jeunes ou dans la gestion des catastrophes naturelles, le Maroc a besoin d'une équipe ministérielle proactive, capable de voir plus loin que la simple échéance électorale.

Bien sûr, il y a toujours la possibilité que ce remaniement, tant espéré par certains, ne voie jamais le jour. Après tout, la politique obéit souvent à l’arithmétique politicienne, et celle-ci n’est pas toujours en phase avec les attentes du peuple.

Akhannouch pourrait ainsi choisir de serrer les dents, faire fi des critiques et continuer dans sa logique comme si de rien n’était. Mais est-ce vraiment la meilleure option ? En tout cas, que ce remaniement ait lieu ou non, ce qui importe, c'est que les Marocains retrouvent confiance en leur gouvernement. Et pour cela, il faudra plus que des discours cosmétiques. Il faudra des actes. Et vite !. 

 

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