Le haut-commissariat au Plan (HCP) vient de présenter quelques aspects liés à la transition de la fécondité au Maroc, à l'occasion de la Journée mondiale de la population (11 juillet) qui se tient cette année sous le thème : « Planification familiale : Donner aux populations la capacité d’agir, contribuer au développement des pays ».
Le nombre moyen d’enfants par femme, après avoir culminé à plus de 7 enfants par femme au cours des années 1960, a chuté à près de 2,21 enfants en 2014, voire en dessous du niveau de remplacement des générations[1] dans les villes (2,01 en milieu urbain contre 2,55 en milieu rural en 2014). Selon le HCP, cette baisse accentuée de la fécondité, en moins de trente ans au Maroc, a nécessité près de deux siècles en France où la fécondité est passée d'un peu plus de 6 enfants par femme au milieu du XVIIIème siècle à près de 2 enfants par femme dans les années trente. Le changement dans le calendrier de la nuptialité et, dans une grande mesure, le recours de plus en plus massif à la contraception sont les principaux facteurs qui expliquent cette transition rapide de la fécondité au Maroc.
Une nuptialité de plus en plus tardive
Si la tradition du mariage précoce et universel prédominait au Maroc en 1960, et plus souvent arrangé dès la puberté, les mutations socioéconomiques qui ont marqué la société marocaine durant les cinq dernières décennies ont entraîné un bouleversement de cette situation. L’âge au premier mariage féminin, de moins de vingt ans vers les années soixante, est passé à plus de 25,7 ans en 2014.
Un succès de la politique de planification familiale
Si l’âge au premier mariage constitue une des variables clés du déclenchement de la baisse de la fécondité, sa contribution a diminué progressivement au profit de la diffusion des moyens de limitation volontaire des naissances. La prévalence contraceptive a connu une augmentation très importante au fils des années. D’environ 6% des femmes en âge de reproduction utilisant une méthode contraceptive en 1960, elle est passée à 19% en 1979, 63% en 2004 et 67,4% en 2011. La prévalence contraceptive se situe à 65,5% en milieu rural et à 68,9% en milieu urbain.
La planification familiale au Maroc est de plus en plus orientée vers l'utilisation de la contraception moderne, avec une prévalence de 55%. Le recours aux méthodes traditionnelles ne représente qu’une prévalence de 8%. L'utilisation de la contraception chez les femmes selon le niveau d’instruction fait apparaître des différences relativement modestes. Ainsi, le taux de prévalence passe de 86,9% chez les femmes n’ayant aucune instruction à 90,8% chez celles ayant atteint le niveau secondaire. La prévalence reste très faible (11%) chez les femmes n'ayant aucun enfant et s’accroit fortement avec la parité. Elle atteint 70,1% chez les femmes ayant un à deux enfants et 79,3% chez celles qui ont trois à quatre enfants.
Au-delà de la baisse de la fécondité, la planification familiale aurait contribué à réduire considérablement les risques de morbidité et des mortalités maternelles et infantiles. La mortalité maternelle a chuté significativement, passant de 227 décès pour 100 mille naissances vivantes en 2004 à 72,6 en 2016. La mortalité infantile est passée, également, de 40 pour 1000 naissances en 2004 à 28,8 en 2010.
L’amélioration du statut de la femme, un facteur clé de la transition de la fécondité
L’aptitude à lire et à écrire et la scolarisation diplômante ont ouvert aux femmes de nouvelles perspectives quant à leur autonomie et leur insertion professionnelle, engendrant ainsi le recul de leur âge au mariage et le recours de plus en plus massif à la contraception. L’amélioration de la scolarisation des filles de 7-12 ans, avec un taux net dans le primaire de 94,4% en 2014, a été accompagnée par une alphabétisation des femmes marocaines se situant à 57,9% en 2014 au lieu de 4% en 1960. La participation des femmes à la vie active au Maroc est également en amélioration. D’environ 17% en 1982, leurs taux d’activité est passé à 25,1% en 2014.
Baisse de la fécondité et aubaine démographique
Le recul accentué de la fécondité amorçant une tendance à la baisse de la population âgée de moins de 15 ans, conjugué à la forte croissance de la population potentiellement active et un poids des générations âgées encore supportable, offre au Maroc une aubaine démographique. L’indice de dépendance, qui exprime la charge de la population active en termes de population inactive[2], connaît une diminution depuis 1970. Cette diminution devrait se prolonger d’ici 2030, avant de reprendre une croissance soutenue jusqu’en 2050.
La valorisation de ce bonus démographique requiert des investissements importants dans les domaines de l’éducation, notamment de qualité, de la santé pour un accès complet aux services de soins et enfin de l’activité économique, pour une offre d’opportunités d’emploi, notamment à la hauteur des aspirations des jeunes diplômés.