La Plateforme nationale protection des migrants (PNPM), un réseau d'organisations et d’acteurs de la société civile basés au Maroc et actifs dans le secteur de la migration et des droits humains, vient de publier une brochure sur la «Situation administrative et identification des mineurs étrangers non accompagnés (MENA) au Maroc».
Par MENA, il est entendu tout mineur (moins de 18 ans) qui se trouve sur un territoire sans parent, tuteur, ou adulte référent qui en ait la responsabilité par la loi ou la coutume. La mention «étrangers» est mise pour distinguer ces enfants qui se trouvent au Maroc- en dehors de leur pays d’origine-, des mineurs non accompagnés marocains.
Selon la PNPM, le nombre de MENA avoisinerait les 10% de la totalité de la population migrante présente sur le territoire marocain. Leur cadre de vie est notamment marqué par les éléments suivants :
• Isolement fort, du fait de l’absence de leur famille, mais aussi des faibles liens avec les populations locales, ce qui freine leur intégration dans la société d’accueil.
• Conditions de vie précaires. Leur principale source de revenu est la mendicité. Ils ont par ailleurs un accès très restreint aux services de base (santé, éducation, justice, protection), essentiellement par manque d’information.
• Cibles vulnérables, exposées aux abus. Plus de la moitié de ces enfants déclare avoir été victime de violence à un moment ou à un autre de son parcours migratoire.
Quant à leur situation administrative, le cadre juridique en vigueur à ce jour au Maroc, indiquant que les personnes majeures doivent obligatoirement être titulaires d’un titre de séjour (article 6, loi 02-03), laisse un flou sur la situation des mineurs, dont on peut déduire qu’ils sont dispensés de la présentation d’un titre de séjour. Par conséquent, l’absence de titre de séjour ne devrait en aucun cas constituer un obstacle pour l’accès aux droits pour les mineurs.
Dans les faits cependant, le titre de séjour est souvent exigé à ces mineurs, notamment dans le cadre de formations relevant du ministère de l’Education nationale et de la Formation professionnelle, qui ne sont pourtant pas assimilables à des situations de travail (pour lesquelles l’exigence d’un titre de séjour serait fondée).
Le CNDH souligne qu’en cas de refus d’accès aux droits pour des ressortissant (es) étrangers (ères) mineur (es), au motif de l’absence de titre de séjour, il convient de rappeler aux autorités concernées les dispositions de l’article 6 de la loi n°02-03. Dans l’hypothèse où le refus d’accès aux droits persiste, les personnes concernées sont encouragées à prendre contact avec la CRDH de leur région.
La PNPM plaide pour que la question de la situation administrative des MENA soit régulée par un cadre légal pérenne et protecteur de l’intérêt supérieur de l’enfant. Elle souhaite que :
- Soit levée toute exigence d’un titre de séjour aux mineurs étrangers, et que toute situation contraire à cette recommandation soit dénoncée.
- Un cadre légal soit prévu (en dehors des opérations exceptionnelles de régularisation) facilitant l’obtention d’un titre de séjour pour les mineurs non accompagnés âgés de 16 ans et qui souhaitent travailler.
Au-delà de l’obtention d’un titre de séjour, détenir une pièce d’identité est un gage de protection pour les enfants, puisqu’il est la preuve de leur minorité, ce qui les classe dans une catégorie protégée par la loi, notamment pour les expulsions hors des frontières marocaines (article 26, loi 02-03). Aussi, la pièce d’identité est très souvent demandée pour avoir accès aux services publics, ou tout simplement pour faire valoir ses droits (dépôt de plainte par exemple).
Bien souvent, les MENA qui se trouvent au Maroc ne disposent d’aucune pièce d’identité. Selon les autorités diplomatiques de leur pays d’origine, la procédure d’obtention n’est pas la même. Celle-ci peut être très coûteuse, longue et compliquée. Certains consulats exigent, pour les mineurs non accompagnés, que les démarches soient effectuées avec l’aval de leurs parents. Or, il peut arriver que l’enfant n’ait plus de famille dans son pays d’origine ou qu’il soit en rupture avec sa famille et ne souhaite pas renouer le contact.
Dans ces situations, il arrive malheureusement que les MENA ne puissent donc obtenir plus qu’un certificat de nationalité (or toutes les autorités diplomatiques ne délivrent pas un tel document).■