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Tranches de vie : Moi, Noor, addict et prostituée

Tranches de vie : Moi, Noor, addict et prostituée

Aujourd’hui, je vais vous raconter l’histoire de Noor, 22 ans, addict et prostituée, depuis 5 ans. Sa vie (si on peut appeler cela vie) est un enfer à ciel ouvert. Son premier sniff, elle l’a eu lors d’une soirée arrosée avec d’autres filles, plus âgées qu’elle, qui l’avaient invitée chez des hommes pour se faire de l’argent et «prendre du bon temps». Elle tire pour la première fois de sa vie sur la cocaïne, se sent ailleurs, lève le voile sur ses inhibitions et décide : «de se servir de la cocaïne comme carburant pour sortir et voir des mecs. Je me sentais plus forte et j’osais plus de choses tout en prenant des risques», dit-elle. 

Les jours passent, les mois défilent, Noor ne peut plus se passer de ses doses de plus en plus importantes. Plusieurs grammes par semaine, plusieurs soirées très alcoolisées, plusieurs clients, sans protection, sans aucune hygiène et en prenant tous les risques. Les drogues et les garde-fous ont cédé. C’est le dernier cercle des enfers. Le corps commence à accuser le coup. Noor maigrit à vue d’œil. Ses dents pourrissent. Les cernes gagnent du terrain sur son visage émacié. Les cheveux tombent et les extensions lui provoquent de l’eczéma sur le cuir chevelu. Les ongles sont rongés par les faux ongles et toutes ces matières chimiques qu’elle applique dessus. Le teint est blafard, grisâtre. Noor souffre de nausées et de vomissements. Elle ne se nourrit presque plus. Elle ne se lave plus. Fatiguée, exténuée, lessivée, comme elle le répète: «Quel mec voudrait se faire une meuf qui ressemble à un cadavre ! J’étais un fantôme et je ne sortais plus. Plus de mecs, plus d’argent, plus de doses, c’est la mort que je vivais pendant des jours et des jours», raconte-t-elle. Et de se rappeler de tous ces mois de folie et d’hystérie, entre épisodes extrêmes de manque et volonté d’en finir. 

Plusieurs semaines de calvaire passent avant qu’un ancien client vienne à son secours en la faisant admettre malgré son refus dans une unité de soins à Casablanca où elle a été prise en charge et suivie par une équipe rompue aux cas extrêmes. Après trois mois d’hospitalisation, Noor retrouve des couleurs. Elle mange, elle boit beaucoup d’eau (pendant les années d’excès de drogues, elle ne buvait même plus pendant des jours), elle fait du sport, elle commence à sortir faire de la marche, elle revoit sa famille et n’a touché à aucune drogue depuis 94 jours exactement. Pour son psychiatre, c’est une grande victoire de voir cette jeune femme sortir de l’enfer. 

Aujourd’hui, Noor vit en appartement thérapeutique, avec des soignants dédiés pour l’accompagner jusqu’au bout afin de mettre sur pied un projet de vie, pour travailler, gagner sa vie dignement et se prendre en main avec la ferme volonté de ne jamais récidiver. Car ce risque demeure majeur et beaucoup s’y sont fait prendre. 

Noor trouve un stage dans une association et compte se faire embaucher avec un salaire décent qui lui permettra de vivre en ne comptant que sur elle-même. Elle a grand espoir d’y arriver.

 

 

Par Abdelhak Najib 

 

 

 

 

 

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