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Travail des enfants : Le Maroc avance à petits pas

Travail des enfants : Le Maroc avance à petits pas

Au lieu d'emprunter le chemin de l'école, plusieurs enfants se voient contraints d'intégrer le marché du travail malgré leur jeune âge, afin de subvenir aux besoins de leur famille confrontée à des difficultés financières.

 

Par M. Boukhari

Au Maroc, le travail des enfants est toujours d'actualité. Toutefois, les chiffres semblent avoir reculé au fil des années. A en croire de récentes données du haut-commissariat au Plan (HCP), en 2023, le nombre d'enfants au travail a baissé de 13,4% par rapport à 2022 et 55,5% par rapport à 2017. Dans la même veine, le ministre de l’Inclusion économique, de la Petite entreprise, de l’Emploi et des Compétences, Younes Sekkouri, a fait savoir récemment que le Royaume est parvenu à réduire le nombre d’enfants travailleurs de 94% au cours des deux dernières décennies.

En 2023, parmi les 7.775.000 enfants âgés de 7 à 17 ans, 110.000 étaient engagés dans une activité économique, représentant ainsi 1,4% de cette tranche d’âge, indique le HCP. La même source précise que cette part est de 2,8% en milieu rural, soit 88.000 enfants, et de 0,5% en milieu urbain, ce qui équivaut à 22.000 enfants. Me Abdelhakim El Kadiri Boutchich, juge près la Cour internationale de résolution des différends «Incodir» à Londres, et consultant international auprès de l'Ordre mondial des experts internationaux à Genève, souligne que le travail des enfants au Maroc repose sur une législation nationale robuste et sur des engagements internationaux, visant à protéger les enfants contre l'exploitation et à garantir leur bien-être.

«Le Dahir n° 1-03-194 du 11 septembre 2003, portant promulgation de la loi n° 65-99 relative au Code du travail, fixe plusieurs dispositions cruciales pour la protection des enfants. L’âge minimum pour travailler est fixé à 15 ans, en vertu de l'article 143. Cette disposition est essentielle car elle aligne le Maroc avec les standards internationaux de l’Organisation internationale du travail (OIT) sur l’âge minimum de travail. L’article 147 du même code va plus loin en interdisant le travail des enfants dans des conditions dangereuses et nuisibles à leur santé, sécurité ou moralité. Cela inclut des environnements de travail qui pourraient physiquement ou moralement nuire aux enfants, une mesure visant à éviter leur exploitation dans des secteurs à risques. Le Code du travail réglemente également les heures de travail pour les jeunes âgés de 15 à 18 ans. L’article 184 limite la durée de travail à 10 heures par jour, y compris les heures supplémentaires. Cette régulation est importante pour prévenir l’exploitation des jeunes travailleurs et garantir qu'ils ont suffisamment de temps pour se reposer et poursuivre leurs études ou formations», explique-t-il.

 

Education obligatoire

En outre, ce fléau social semble affecter davantage la gent masculine que la gent féminine. Parmi les enfants au travail, 85,6% sont des garçons, 91,5% ont entre 15 et 17 ans, et 79,9% proviennent d’un milieu rural. De plus, 8,6% d'entre eux sont encore scolarisés, tandis que 89,1% ont quitté l’école et 2,3% n'y ont jamais été. «La loi marocaine impose également l'éducation obligatoire jusqu'à l'âge de 15 ans. Cette politique vise à maintenir les enfants à l'école, réduisant ainsi leur exposition au travail prématuré et potentiellement dangereux. L'éducation obligatoire est une mesure proactive pour lutter contre le travail des enfants, en assurant que les enfants reçoivent une éducation de qualité, ce qui les prépare à des opportunités futures dans de meilleures conditions», renchérit Me El Kadiri Boutchich. Le phénomène est principalement concentré dans certains secteurs économiques et varie selon le lieu de résidence. Dans les milieux ruraux, 74,1% des enfants travaillent dans l’agriculture, la forêt et la pêche. En revanche, dans les zones urbaines, les services représentent 51% des emplois d'enfants, suivis par l’industrie qui emploie 28,1% d'entre eux.

 

Danger au travail

En travaillant, les enfants s'exposent à divers dangers variés. Selon le HCP, près de 63,3% des enfants au travail accomplissent des travaux dangereux, soit 69.000 enfants. Qui plus est, les enfants exerçant dans le secteur des BTP restent les plus exposés aux dangers, avec une part de 80,8%. Cette proportion est de 79,3% dans le secteur de «l’industrie», 77,7% dans les «services» et de 53% dans «l’agriculture, forêt et pêche». «L’emploi des enfants de moins de 15 ans est généralement interdit, sauf dans certains cas spécifiques et réglementés.

Pour les enfants âgés de 15 à 18 ans, ils ne peuvent pas être employés dans des travaux dangereux ou nuisibles. Le décret n° 2-04-469 du 29 décembre 2004 et l’arrêté du ministre de l'Emploi et de la Formation professionnelle n° 160-05 du 9 février 2005 précisent les types de travaux considérés comme dangereux. Cette liste détaillée de travaux interdits aux jeunes travailleurs assure une protection renforcée contre des formes de travail qui pourraient avoir des conséquences graves sur leur santé et leur sécurité», insiste Me El Kadiri Boutchich. Et de poursuivre : «Pour les jeunes travailleurs âgés de 15 à 18 ans, des restrictions claires sont imposées sur les heures de travail. Ils ne peuvent pas travailler plus de 10 heures par jour, et doivent bénéficier d'un repos hebdomadaire d'au moins 24 heures consécutives. Ces règles sont cruciales pour protéger les jeunes contre l'épuisement et pour leur permettre de jouir d'un équilibre travail-vie personnelle».

Il est à noter que les employeurs qui enfreignent les lois sur le travail des enfants au Maroc s'exposent à des sanctions sévères, incluant des amendes et des peines d'emprisonnement. «Ces sanctions sont dissuasives et visent à renforcer le respect des lois pour protéger les droits des enfants. La sévérité des sanctions est un indicateur de l'importance accordée par le Maroc à la lutte contre l'exploitation des enfants», précise le juge.

Dans le cadre des efforts déployés par le Maroc en vue de lutter contre ce phénomène, il existe la ratification de plusieurs conventions internationales de l’Organisation internationale du travail. Il s’agit notamment de la Convention n°138 sur l'âge minimum et la Convention n°182 sur les pires formes de travail des enfants. «Ces ratifications obligent le Maroc à adopter des mesures efficaces pour abolir le travail des enfants et les protéger contre les formes de travail les plus exploitatives. L'adhésion à ces conventions internationales montre l'engagement du Maroc à respecter les normes mondiales et à améliorer les conditions de vie des enfants», dixit Me El Kadiri Boutchich.

 

Les recommandations de Najat Anwar, présidente de l’ONG «Touche pas à mon enfant»
Selon Najat Anwar, plusieurs mesures doivent être mises en œuvre pour prévenir le phénomène du travail des enfants au Maroc, notamment :
• Intensifier les campagnes de sensibilisation pour informer la société sur les dangers du travail des enfants et l'importance de respecter leurs droits.
• Renforcer les lois existantes pour protéger les enfants et lutter contre leur exploitation.
• Fournir aux enfants exploités un environnement sûr ainsi qu'un soutien psychologique, social et éducatif, tout en aidant leurs familles.
• Encourager une coopération étroite entre le gouvernement, les ONG et d'autres parties prenantes pour une action efficace.
• Orienter et éduquer les familles et les communautés sur les risques du travail des enfants et les alternatives viables pour assurer un revenu.
• Améliorer l'accès à l'éducation et à la formation pour les enfants vulnérables afin de leur offrir un avenir meilleur.
• Mettre en place d'un système de suivi et d'évaluation pour surveiller la persistance du travail des enfants, suivre les progrès des initiatives et apporter des améliorations continues, notamment dans les zones rurales.

 

 

 

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