Le Madleen, navire symbolique affrété pour briser le blocus de Gaza, n’aura pas atteint les côtes palestiniennes. Intercepté lundi à 185 kilomètres de la bande de Gaza par la marine israélienne, le bateau a été dérouté et ses passagers arrêtés, suscitant une indignation internationale.
Parmi les passagers : des militants des droits humains, l'eurodéputée franco-palestinienne de gauche, Rima Hassan, ou encore la Suédoise Greta Thunberg. Autant dire que ce n’était pas une banale croisière. Ils sont partis d’Italie pour rallier donc une zone d’apocalypse humanitaire. Mais à défaut d’atteindre Gaza, ils auront atteint leur objectif symbolique : rappeler que l’oubli est une forme de complicité.
En France, l’affaire a relancé les passions. Le ministre des Affaires étrangères, Jean-Noël Barrot, a dénoncé des «manœuvres de désinformation» de certains responsables politiques, tandis que Jean-Luc Mélenchon accusait la diplomatie française d’une «nullité» sans nom. Au-delà du retentissement médiatique de cette initiative, il y a une réalité que l’on ne peut taire : Gaza continue de sombrer, avec plus de 54.000 morts palestiniens, des centaines de milliers de déplacés, des enfants affamés et des hôpitaux à l’agonie. L’OMS a, une fois de plus, tiré la sonnette d’alarme : l’hôpital Al-Amal est «pratiquement hors service», tandis que le complexe Nasser est le dernier îlot de survie en soins intensifs. Une situation que les Nations unies n’hésitent plus à qualifier de possible «génocide». Le mot est lâché. Navi Pillay, présidente de la commission d’enquête de l’ONU, parle «d’extermination».
Rien de moins. Dans un de ses rapports les plus accablants, la commission accuse Israël non seulement de crimes de guerre, mais de porter atteinte à l’identité collective d’un peuple tout entier. La solution à deux Etats A l’international, les signaux se multiplient. Une caravane partie de Tunisie, via la Libye, entend rallier Gaza avec 1.500 personnes à bord de bus et de véhicules. Pas pour livrer de l’aide humanitaire, mais pour témoigner, «symboliquement», de leur solidarité.
Côté diplomatique, Mahmoud Abbas, en perte de vitesse, tente un ultime come-back. Il a écrit à Emmanuel Macron et au prince héritier saoudien, Mohammed ben Salmane. Il condamne l’attaque du Hamas du 7 octobre 2023, accepte la démilitarisation du mouvement et promet des élections. A 89 ans, le président de l’Autorité palestinienne se positionne donc en homme providentiel pour les chancelleries occidentales en quête d’interlocuteur légitime.
Paris, bien évidemment, salue ces engagements «inédits» qui confortent «la mise en œuvre de la solution à deux Etats». Et Macron, qui veut bien reconnaître un Etat palestinien en espérant que cela fasse boule de neige, table sur la conférence internationale qui s’ouvrira le 18 juin à New York pour se faire entendre. Placée sous l’égide des Nations Unies et co-présidée par la France et l’Arabie saoudite, elle pourrait marquer un tournant décisif dans le conflit israélo-palestinien. Ou se résumer en une énième rencontre où les dirigeants vont parader pour délivrer des discours cosmétiques. Discours qui ne mettront point fin à cette guerre et à l’extermination méthodique et ignoble du peuple palestinien entreprise par Israël.
Par D. William