Quel voyeurisme ! Et quelle inclination à la futilité et la banalité les plus criardes ! On le voit, on le sait, la vie des autres fait recette.
Chaque jour, des millions de Marocains diffusent des informations en boucle sur des affaires privées des uns et des autres.
Comme c’est le cas depuis quelques jours, avec la vie du footballeur marocain Achraf Hakimi. On publie. On commente. On donne son avis. On juge. On insulte.
On joue les parangons de vertu, dans une mascarade qui en dit long sur ceux qui s’adonnent à ces commérages de concierge. Franchement, en quoi les affaires privées de cet homme et de son ex-femme peuvent-elles nous intéresser ? Ils ont divorcé; et alors ? La belle affaire.
Cela ne regarde qu’eux deux. Pourquoi les uns et les autres fourrent leur nez dans l’intimité des gens et se lâchent dans la bêtise la plus primale.
Nous ne nous faisons aucune illusion sur les instincts basiques des humains qui aiment les commérages, les potins, les qu’en-dira-t-on, les secrets de polichinelle et autres fadaises du même acabit.
Cela montre à quel point la vie des uns et des autres est si vide, si banale pour qu’ils la remplissent par celle des autres. Ils cherchent. Ils fouillent. Ils manigancent. Ils complotent. Ils jubilent face aux problèmes des autres.
Un divorce ? Waw, c’est top, je vais le partager. Un décès ? C’est encore mieux, je vais liker. Une catastrophe ? Impeccable, je vais commenter.
Dans une immense braderie de la connerie en barre, on lâche les vannes et on véhicule la bêtise à grand renfort de partages.
C’est symptomatique de l’état d’éveil d’une société toute cette préférence pour le populisme, pour le grégaire, pour la banalité dans toutes ses manifestations.
Et cela ne sert à rien tout cet étalage des vies privées des autres.
Mais comme les uns et les autres, beaucoup trop nombreux sont ceux et celles qui n’ont strictement rien à faire de leurs heures longues et vides que d’être aux aguets, dans l’attente effrénée de la dernière connerie qui va tomber : et vas-y que j’inonde la toile avec cette guimauve qui consacre la débilité et l’érige en norme, dans une course sans retenue vers le plus de médiocrité possible.
C’est à croire que l’on redouble d’efforts pour montrer le maximum de médiocrité possible !
C’est si affligeant, si indigent, si indigeste et si petit que c’est écœurant toute cette fascination face au malheur et face à la morbidité. Pourtant, c’est si humain toute cette petitesse mâtinée à autant de décadence morale et éthique.
Par Abdelhak Najib, Écrivain-journaliste
