L'historien et défenseur des droits humains franco-marocain Maâti Monjib, en grève de la faim depuis 19 jours, va être remis en liberté provisoire après trois mois de détention, a annoncé mardi son avocat à l'AFP.
"Le juge d'instruction a décidé de le remettre en liberté provisoire, les mesures sont en cours pour l'extraire de prison", a déclaré Me Mohamed Messaoudi, précisant que la santé de son client était "bonne même s'il a perdu 12 kilos".
L'intellectuel de 60 ans dénonçait son arrestation "abusive" depuis son interpellation le 29 décembre dans le cadre d'une enquête préliminaire pour "blanchiment de capitaux".
Parallèlement, il a ensuite été condamné à un an de prison le 27 janvier pour "fraude" et "atteinte à la sécurité de l'Etat" au terme d'un procès ouvert en 2015 et plusieurs fois reporté. Ses avocats et son comité de soutien s'étaient indignés de ce jugement, rendu en l'absence de l'accusé et sans convocation de sa défense.
Face aux critiques, les autorités marocaines mettent toujours en avant l'indépendance de la justice et la conformité des procédures.
Il y a près de deux semaines, Monjib avait fait déposer une plainte à Paris pour "harcèlement moral", "mise en danger de la vie d'autrui" et pour "atteinte à la liberté individuelle par des personnes exerçant une fonction publique", ce dernier point correspondant en droit pénal français à la détention arbitraire.
L'historien "est l'une des voix critiques les plus emblématiques du régime marocain, dénonçant notamment la mainmise des services de sécurité sur la vie politique, qui s'apparente à une vraie police politique", avaient alors souligné ses avocats français, fustigeant des procédures "manifestement politiques".
Ses soutiens en France et au Maroc ont plusieurs fois demandé "la libération immédiate" du "prisonnier d'opinion", s'inquiétant des "effets, sur sa santé et sur sa vie, de (sa) grève de la faim".
Maâti Monjib souffre de troubles cardiaques et de diabète, problèmes médicaux qu'il avait évoqués sur sa page Facebook en annonçant en novembre qu'il avait été contaminé par le coronavirus.
"Son moral est bon", a indiqué mardi son avocat, ajoutant souhaiter que son client "bénéficie de toutes les garanties d'un procès équitable". Monjib a toujours nié les faits qui lui sont reprochés, à savoir des malversations dans la gestion d'un centre qu'il avait créé notamment pour promouvoir le journalisme d'investigation.
Il a été jugé et condamné en même temps que six journalistes et militants qui ont écopé de peines allant jusqu'à un an de prison ferme. Trois d'entre eux ont quitté le Maroc avant d'obtenir l'asile politique en France et aux Pays-Bas.
L'intellectuel avait entamé sa grève de la faim le 4 mars dernier pour demander "sa remise de liberté immédiate" et refusait depuis de s'alimenter malgré les injonctions de l'administration pénitentiaire.
La semaine dernière, son épouse Christiane Darde avait interpellé le président français Emmanuel Macron sur son compte Twitter: "Sa santé est en jeu. SVP, intervenez vite pour sa libération!", avait-t-elle écrit.
Lundi, l'intellectuel avait demandé son transfert dans un hôpital pour "continuer sa grève de la faim sous surveillance médicale", selon son comité de soutien.
Son état s'"est nettement affaibli" et il "a perdu conscience à plusieurs reprises", avaient alors souligné ses soutiens.
Monjib devrait quitter d'ici la fin de journée la prison d'El Arjat près de Rabat, où il est détenu depuis son arrestation.
(AFP)