Face à l’horreur de ce meurtre, face à la colère larvée et qui attendait un allume-gaz pour éclater, quand on lit les déclarations et les commentaires des uns et des autres, nous sommes frappés par toute cette haine qui ne se cache plus, par cette violence qui cherche le pire.
Abdelhak Najib
Écrivain-journaliste
Dans ce chaos généré par ce drame humain terrible, chacun y va de son credo, entre démagogie et manipulation de tout poil, des idéologies racistes, des préjugés indécrottables et des discriminations à tout-va, avec un regain de xénophobie à l’échelle planétaire, avec le retour des extrêmes droites au pouvoir dans certains pays, ce qui n’augure de rien de bon pour les années à venir, dans un monde, de plus en plus divisé.
Le monde, on le sait, depuis toujours, est fou. Avec les décennies qui défilent, les choses sont très loin de s’arranger. Pire, les vingt premières années du XXIème siècle sont les plus cruelles, les plus barbares et les plus dévastatrices de ces quatre-vingt dernières années. Une démographie galopante, huit milliards d’êtres humains qui ne savent plus à quel diable se vouer, avec l’incertitude et le désespoir comme uniques viatiques dans une époque très dangereuse.
Le monde est un endroit très dangereux aujourd’hui. Là où l’on regarde, presque partout sur le globe, c’est un brasier de tous les diables au nom de tous les dieux. Je me demande comment on en est arrivé à ce point ?
C’est simple. Parce que, c’est aujourd’hui une constante, chacun sur cette planète réclame son dieu. Sur les huit milliards d’humains, chacun voit la vérité à sa porte. Chacun croit à sa vision du monde qu’il veut imposer à tous les autres, coûte que coûte. Et chacun va tenter de lui faire entendre raison. On pourrait convaincre Belzébuth de nous laisser mariner dans nos vies, sans nous prendre la tête que de persuader le voisin que nos vies nous appartiennent et qu’il n’a, le bougre, aucun droit de regard sur qui nous sommes, sur ce que nous faisons, sur comment nous appréhendons la vie, sur ce que nous pensons, et quels sont nos choix et nos valeurs. Aujourd’hui, chacun veut convertir l’autre. Chacun veut infléchir l’autre. Chacun veut convaincre l’autre qu’il a tort et que c’est lui seul qui a raison. Chacun crée ses propres vérités et jette l’anathème sur ce qu’il nomme les hérésies des autres. C’est démentiel. C’est absolument perturbant et très dangereux.
Pourtant, chacun de nous devrait avoir le droit de vivre en paix et sans être stigmatisé ni ostracisé à cause de sa religion, de son identité, de sa couleur de peau et de ses idées.
Mais les tarés de tous poils ne l’entendent pas de cette oreille. Ils font la sourde oreille. Ils ont pourtant de longues oreilles, mais ils sont frappés de surdité. Partout, où que vous soyez sur cette terre, il y a quelqu’un qui refuse votre liberté telle que vous la concevez. Partout, et cela ne date pas des dernières grandes guerres mondiales, ni de ladite guerre froide, ni du 11 septembre 2001, ni de l’invasion de l’Afghanistan et de l’Irak, ni de la dislocation de la Libye, du Yémen et de la Syrie, ni du retour du spectre fatal des hégémonies impériales telles que déclinées aujourd’hui par la Russie, par la Chine, par les USA… Cela ne date pas, non plus, de cette origine de la terreur telle qu’on nous la sert aujourd’hui, à renfort d’images sanglantes, 24h sur 24, sur des chaînes de télévision qui donnent dans la surenchère de l’horreur, à la solde du plus offrant, véhiculant le mensonge au kilo et les Fake News au rabais.
Cela existe aussi ailleurs et partout dans ce monde qui a cédé à l’absurdité, à la folie, à l’hostilité, obéissant à d’autres impératifs idéologiques et souvent économiques, du Nord au Sud, de l’Est à l’Ouest. Racisme, ségrégation raciale, génocides, tueries de masse au nom du sacré, qui porte aujourd’hui d’autres appellations comme croissance, développement, progrès, succès, essor et richesse à tout prix. C’est partout et depuis que l’homme est homme que la haine de l’autre, de tous les autres, prime sur tout le reste, surtout quand les crises s’installent et obligent les humains à montrer leur véritable visage.
Aujourd’hui, il y a partout tant de fosses communes qui témoignent de la barbarie des hommes. Martin Luther King voulait que nous soyons tous frères pour ne pas devenir fous ! Il savait de quoi il parlait. Mais nous sommes si loin de cette fraternité. Nous n’avons aucun espoir d’égalité parce que nous refusons la liberté de tous et de chacun, dans le respect de la vie en communauté. C’est cela la face hideuse du monde aujourd’hui. Elle est d’autant plus crasseuse cette image que nous l’avons martelée, à chaque instant sur tous les canaux de communication possibles. Télé, radio, satellites, paraboles, smartphones, tablettes, réseaux sociaux et asociaux de tous genres…
Pourtant, jamais les humains n’ont été aussi éloignés les uns des autres et sourds aux appels de la raison. Jamais, ils n’ont été aussi divisés et aussi clivés. Jamais, ils n’ont été aussi malades, traînant tant de pathologies ostentatoirement comme dans une braderie de l’horreur. Jamais, ils n’ont été aussi stupides, aussi bêtes, téléguidés par des gadgets qui ont remplacé ce qui leur restait de matière approximativement grise et sans nuances.
Aujourd’hui, on juge à travers un tweet, on aime à travers un post. On commente la vie virtuelle des uns et des autres et on tire à boulets rouges sur le voisin à qui on ne dit jamais bonjour. Je vous l’ai dit, ce monde est une sacrée M… où l’on patauge tous croyant avoir atteint des sommets de je ne sais quoi. Mais, réveillez-vous ! On n’a rien atteint du tout, sauf un haut degré de haine, doublé de misère intellectuelle, saupoudré de bêtise crade, le tout enveloppé dans une grosse arnaque qui se nomme : communication. Comme celle qui circule aujourd’hui après ce drame de Nanterre qui a plongé la France dans le chaos. Cette communication du rejet, de la division, de la ségrégation, de la haine et de la violence.