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Bensaid, le CNP et la fin du tripatouillage institutionnel

Bensaid, le CNP et la fin du tripatouillage institutionnel

Le Parlement a adopté, mardi à l’unanimité, le projet de loi n° 026.25 portant réorganisation du Conseil national de la presse, lors d’une séance plénière tenue à la Chambre des conseillers. Et ce, au-lendemain du passage du texte à la Commission de l’enseignement et des affaires culturelles et sociales.

 

 

Le vote serré enregistré à la Commission de l’enseignement et des affaires culturelles et sociales, lundi dernier à la Chambre des conseillers, dit beaucoup de la nature du projet de loi n° 026.25. En effet, avec six voix pour et cinq contre, la réorganisation du Conseil national de la presse (CNP) ne laisse personne indifférent, parce qu’elle touche au cœur d’un secteur hautement symbolique et stratégique dans toute démocratie.

Derrière les amendements et les débats procéduraux, c’est une question fondamentale qui traverse ce texte : comment instaurer une autorégulation crédible dans un paysage médiatique bouleversé par la crise économique, la révolution numérique et l’érosion de la confiance publique ?

Le ministre de la Jeunesse, de la Culture et de la Communication, Mohamed Mehdi Bensaid, a choisi d’assumer pleinement ce chantier, défendant bec et ongles un projet qu’il considère comme une mise à niveau nécessaire, voire inévitable.

Son approche vise clairement à corriger les failles du précédent dispositif sans remettre en cause le principe même de l’autorégulation, mais en la dotant enfin d’outils juridiques, institutionnels et réglementaires cohérents. Pour le ministre, il s’agit d’une réforme technique au service de la stabilité du secteur.

D’où son refus catégorique d’introduire un préambule, jugé inutile dans un texte de réorganisation, le socle constitutionnel et les droits fondamentaux étant déjà inscrits dans l’architecture juridique existante. Ce choix, critiqué par certains groupes syndicaux, révèle en réalité une volonté de rester dans une logique de continuité institutionnelle plutôt que de rupture symbolique. 139 amendements déposés Le volume des amendements déposés, soit 139 au total, témoigne toutefois d’un malaise persistant.

Les syndicats, les groupes parlementaires et même des conseillers non affiliés ont cherché à infléchir la philosophie du texte, en particulier sur la composition du Conseil et le mode de scrutin.

Le cœur de la controverse se situe au niveau des 19 membres, répartis entre éditeurs (9 sièges), journalistes (7) et représentants d’institutions (3). Pour les organisations professionnelles, cet équilibre reste biaisé et ne reflète pas suffisamment le poids du journaliste dans l’écosystème médiatique. Pour le gouvernement, au contraire, cette configuration garantit une gouvernance équilibrée, évitant l’inefficacité d’un Conseil pléthorique.

Le rejet des propositions visant à élargir le nombre de membres à 21 ou 23 s’inscrit dans cette même logique. Bensaid privilégie une instance resserrée, capable de décider et d’agir, plutôt qu’un organe élargi où la représentativité accrue risquerait de diluer la responsabilité. Même raisonnement concernant l’amendement visant l’introduction de «journalistes sages» : le ministre estime que la sagesse, l’expertise et l’expérience sont déjà incarnées dans la catégorie existante des membres aux profils reconnus, sans qu’il soit nécessaire de créer des sous-collèges aux contours flous.

Sur le mode de scrutin, le ministre défend la responsabilité personnelle et la transparence, en ce sens que l’individualisation du vote est censée rompre avec les arrangements internes et les alliances conjoncturelles qui risquent d’affaiblir la légitimité du Conseil. Au-delà de la composition du CNP, le projet de loi touche la capacité de la profession à gérer ses conflits en interne.

Le maintien d’une procédure de médiation et d’arbitrage facultative, alignée sur la loi relative à l’arbitrage et à la médiation conventionnelle, traduit la volonté de ne pas transformer le Conseil en une juridiction parallèle. Là encore, Bensaid insiste sur la précision du dispositif proposé, d’autant qu’il offre suffisamment de garanties sans enfermer les acteurs dans des mécanismes lourds ou contraignants.

Au-delà du CNP L’enjeu réel de cette réforme dépasse largement le périmètre institutionnel du Conseil national de la presse. Il concerne la survie même d’un secteur confronté à la fragilisation de son modèle économique, à la concurrence sauvage des plateformes numériques et à la montée des contenus non régulés. Dans ce contexte, l’autorégulation n’est plus un luxe, mais une condition de crédibilité.

Un CNP faible, contesté ou paralysé ouvre la voie soit à l’ingérence directe de l’Etat, soit à l’anarchie en termes d’information. Le pari du gouvernement est donc de renforcer l’institution pour éviter ces deux écueils.

C’est dire qu’en défendant ce projet avec constance, Mohamed Mehdi Bensaid envoie un message clair  : l’Etat fixe le cadre et la profession doit désormais prendre ses responsabilités. Le Conseil national de la presse version 026.25 n’est ni une panacée ni un remède miracle. Mais il marque la fin d’une zone grise et d’un bricolage institutionnel qui ont trop longtemps affaibli la régulation du secteur. 

 

Par D. William

 

 

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