L’Association démocratique des femmes du Maroc (ADFM) a présenté, ce mercredi 2 juillet, les conclusions de son étude intitulée «Recueil des préjugés et des stéréotypes sexistes véhiculés dans les lycées».
Une démarche engagée qui s’inscrit dans le cadre de la dynamique «Pour une école de l’égalité» et du programme «Génération Genre», à l’occasion du 40ème anniversaire de l’ADFM.
Menée dans 13 lycées des régions Rabat-Salé-Kénitra et Casablanca-Settat, cette étude cible le cycle secondaire qualifiant (15-19 ans), une période clé dans la construction des représentations de genre.
Menée de manière qualitative et précise, l’enquête a mobilisé élèves, enseignants et personnel administratif, pour mieux comprendre les processus qui perpétuent les inégalités dans l’environnement scolaire.
Elle révèle les mécanismes profonds qui entravent l'épanouissement des apprenants et perpétuent les inégalités au sein du système éducatif marocain.
Amina Lotfi, membre du bureau exécutif de l’ADFM et de la dynamique pour une école de l’égalité, a affirmé que malgré les intentions et les réformes de ces dernières décennies, le système éducatif, comme le démontre ce recueil, n’a toujours pas réussi à faire de la pédagogie de l’égalité un pilier central.
«L’école continue de reproduire les inégalités au lieu de les combattre, alors qu’elle devrait être un moteur de changement et un espace d’apprentissage de la justice sociale et de l’égalité entre toutes et tous. Pour ce faire, le ministère doit se doter d’une vision globale et cohérente, fondée sur le principe universel de l’égalité. Cette vision doit se traduire par une stratégie concrète, déclinée sur le court, moyen et long terme, avec des objectifs mesurables, des moyens humains et financiers à la hauteur des enjeux».
Et d’ajouter : «L’heure n’est plus aux demi-mesures, il ne peut y avoir de développement durable, sans engagements fermes et une volonté politique réelle pour que l’école ne soit plus un lieu de reproduction des discriminations et devienne enfin un espace d’égalité, de respects des droits universels et de promotion de la citoyenneté».
La finalité de cette étude est de se focaliser sur les préjugés et stéréotypes sexistes qui servent à légitimer les inégalités fondées sur le genre au sein des lycées et qui ont des répercussions directes ou indirectes sur le comportement des élèves mais aussi sur leurs parcours scolaires et professionnels.
L'étude met aussi en lumière un sexisme encore profondément enraciné dans le quotidien des lycéens et lycéennes :
- Corps et personnalité : Les filles sont perçues comme plus faibles physiquement et leur tenue vestimentaire souvent jugée responsable du harcèlement. Une hiérarchisation genrée des traits de caractère influence l’orientation scolaire.
- Sexisme masqué : De nouvelles formes de sexisme émergent, plus subtiles et souvent véhiculées par les enseignants eux-mêmes, sous couvert d’égalité apparente.
- Mixité limitée : Malgré un cadre mixte, les pratiques restent souvent séparées, notamment en classe et lors des activités sportives.
- Environnement rural et périurbain : Ces milieux montrent une plus forte adhésion aux discours masculinistes, renforcée par des conditions socioéconomiques précaires.
- Poids de la matière enseignée : La perception de l’égalité varie selon les disciplines, avec des approches plus traditionnelles dans certaines matières, notamment l’éducation islamique.
- Rôle des manuels scolaires : Ils véhiculent encore des représentations stéréotypées et peu remises en question par les enseignants.
- Impact du numérique : Les réseaux sociaux et les influenceurs propagent des modèles sexistes, amplifiés par les algorithmes.
L’étude propose une série de recommandations concrètes et structurantes pour une école réellement égalitaire :
- Intégrer l’égalité des genres dans les lois éducatives et mettre en place des mécanismes de suivi.
- Mener des campagnes de sensibilisation ciblées et continues.
- Réviser les contenus pédagogiques et former les personnels éducatifs à l’approche genre.
- Développer un usage critique du numérique chez les élèves.
- Mettre en place des outils d’évaluation sensibles au genre et diffuser les bonnes pratiques.
- Impliquer activement les garçons et renforcer la collaboration avec la société civile.
Au-delà du diagnostic, l’ADFM appelle à une mobilisation globale des institutions, de la société civile et des familles pour construire une école équitable où l’égalité entre les genres devient une réalité concrète, et non pas une simple promesse.