L'écrivain franco-algérien Boualem Sansal, figure intellectuelle engagée et critique, a été condamné ce jeudi 27 mars à cinq ans de prison ferme par le tribunal correctionnel de Dar El Beida, près d’Alger.
Cette sentence, rendue en présence de l’accusé, s'accompagne d'une amende de 500.000 dinars algériens (environ 3.500 euros).
Elle intervient dans un contexte déjà chargé de tensions entre Alger et Paris, et risque de creuser davantage le fossé entre les deux capitales.
Agé de 80 ans, Sansal a été reconnu coupable notamment d’"atteinte à l’intégrité du territoire algérien".
Ce grief repose sur des propos tenus dans un média français classé à l'extrême droite, dans lesquels Sansal aurait soutenu la thèse marocaine selon laquelle certaines portions du territoire algérien actuel auraient été arbitrairement rattachées à l’Algérie durant la période coloniale.
L’affaire Sansal, déjà emblématique par la personnalité de l’accusé, s’est rapidement transformée en véritable dossier diplomatique. Son arrestation en novembre dernier avait provoqué une onde de choc.
Elle survenait peu après que le président français Emmanuel Macron a affiché son soutien explicite au plan d’autonomie marocain pour le Sahara, sous souveraineté de Rabat. Une prise de position perçue comme une trahison à Alger, farouche soutien du polisario.
En réponse, l’Algérie avait rappelé son ambassadeur à Paris et menacé de représailles diplomatiques. Depuis lors, la situation entre les deux pays a connu une dégradation inédite. Dans ce climat tendu, la condamnation de Boualem Sansal revêt une dimension politique forte.
Alors que de nombreux observateurs tablaient sur une peine symbolique ou sur un geste d’apaisement, la décision du tribunal d’Alger vient confirmer la fermeté du pouvoir algérien.
L'affaire illustre une fois de plus la perméabilité entre justice et politique dans certains régimes autoritaires, mais aussi la façon dont les intellectuels peuvent devenir, malgré eux, des instruments ou des symboles dans des affrontements géopolitiques d’envergure.
Boualem Sansal, qui s’est toujours tenu à la marge des pouvoirs, en paie aujourd’hui le prix fort.