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Conseil de la concurrence : La carotte et le bâton

Conseil de la concurrence : La carotte et le bâton

Le 22 mars 2021, le Roi nommait Ahmed Rahhou, alors ambassadeur du Maroc auprès de l’Union européenne, à la tête du Conseil de la concurrence (CC). 

Un peu plus d’un an après, force est de constater que Rahhou imprime sa méthode et laisse son empreinte sur le monde des affaires. Il faut dire que, pendant plusieurs années, le CC aura été une coquille vide, une instance contrainte à l’inaction en l’absence de membres qui devaient être nommés. Ce désert dans le domaine de la régulation des affaires a fait le bonheur de certains opérateurs, mais fortement nui au climat des affaires en général.

Aujourd’hui, Rahhou remet les pendules à l’heure. Non en usant d’une forme d’excès de zèle, mais dans le strict respect de la mission du CC. Qui donne son avis sur les demandes de consultation, publie des études sur le climat général de la concurrence sur les plans sectoriel et national et est doté d’un pouvoir décisionnel en matière de lutte contre les pratiques anticoncurrentielles et de contrôle des opérations de concentration économique. Rahhou avait d’ailleurs déjà annoncé la couleur lors de sa prise de fonction.

«Il n’y a pas une économie solide si les règles de la concurrence et de la composition des prix ne sont pas respectées (…) Construire cette économie veut dire sécuriser les investisseurs et les acteurs et, par conséquent, les protéger contre les pratiques qui mettent à mal leurs investissements (…) Notre rôle, a-t-il dit, est celui de la régulation par rapport aux lois relatives à la protection du consommateur, à la fixation des prix et à la concentration. C’est le rôle dont est investi le Conseil par la Constitution et par les lois qui lui sont rattachées, mais c’est aussi une brique essentielle de la confiance que les acteurs économiques vont avoir dans l’économie nationale», avait-il déclaré.

 Des déclarations qui ont été suivies par des actes concrets, en ligne avec l’ensemble des prérogatives du Conseil. En 2021, le CC a ainsi rendu 143 décisions et avis. Il s’agit du contrôle des concentrations économiques, des saisines contentieuses et des demandes d’avis relevant de ses missions consultatives. Dans son rapport annuel, le CC précise que «le contrôle des concentrations économiques occupe la première place en termes de production décisionnelle du Conseil avec 121 décisions rendues en 2021, représentant 84,6% du total des décisions et avis rendus, contre 15,4% pour les activités contentieuses et consultatives qui se sont concrétisées par 16 décisions et 6 avis».

C’est pourquoi Rahhou a pris des initiatives fortes dans ce domaine, notamment dans le cadre de la régularisation de la situation légale des entreprises ayant effectué des opérations de concentration économiques sans les notifier. Ainsi, en juin 2022, le CC a préconisé une procédure spéciale à travers laquelle l'amende à l'encontre de ces entreprises ayant violé la loi sera fixée à un taux de 1% de leur chiffre d'affaires réalisé au Maroc au titre du dernier exercice comptable clôturé, sans calculer les frais; s'y ajoutent, le cas échéant, le chiffre d'affaires réalisé au Maroc au cours de la même période par la partie qui détenait l'entreprise.

Et le 12 septembre courant, une nouvelle disposition est entrée en vigueur, le CC fixant une amende forfaitaire de 500.000 dirhams à l'encontre des entreprises qui violent l'obligation de notification des opérations de concentrations économiques, mais n'ayant pas encore réalisé un chiffre d'affaires annuel.

 

Sanction et pédagogie

Croire que les textes réglementaires publiés par le CC ne sont que de la littérature est un pur leurre. En effet, en avril dernier, le CC avait lancé un signal fort au monde des affaires  : plus question de faire n’importe quoi, au risque de se faire taper au portefeuille. La société Sika AG, qui a acquis 100% du capital de la société financière Dry Mix Solutions SAS, en sait quelque chose. Elle a écopé d’une sanction pécuniaire de 11,7 MDH pour avoir réalisé une opération de concentration économique sans notification préalable au CC et accord de ce dernier, en infraction des articles 12 et 14 de la loi 104-12. En août dernier, le CC se signale à nouveau et épingle, cette fois-ci, une corporation : l’Ordre des experts-comptables.

Pour pratiques anticoncurrentielles avec entente sur les prix, l’Ordre écope d’une sanction pécuniaire de 3 MDH. Mais Rahhou manie aussi bien le bâton que la carotte. Autrement dit, l’action du CC ne résume pas uniquement à sanctionner. Il s’agit aussi de faire de la pédagogie afin de donner aux acteurs économiques les clés pour ne pas tomber sous le coup de la loi. D’où la signature de plusieurs conventions avec les secteurs régulés, ou encore l’organisation de cessions d’information sur le droit à la concurrence. «En définitive, pour une économie aussi ouverte que celle du Maroc, notre rôle est de veiller à ce qu’il y ait une égalité des chances des acteurs et une bonne protection des consommateurs. Ce qui se fera, entre autres, par la pédagogie», nous confiait Rahhou dans une interview.

 

D.William

 

 

 

 

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