Donald Trump est un génie. Un soir, après une soirée trop calme devant la télévision, lui est venue sa dernière trouvaille : rouvrir Alcatraz. Oui, cette célèbre prison, figée dans le temps, où Al Capone a été détenu et où Clint Eastwood, avec une pelle, a construit sa légende.
«J’ordonne au Bureau des prisons ainsi qu’au ministère de la Justice, au FBI et au ministère de l’Intérieur de rouvrir, agrandir substantiellement et reconstruire Alcatraz pour enfermer les criminels les plus dangereux et violents d’Amérique», a écrit sur son réseau Truth Social le locataire de la Maison-Blanche. Qui semble avoir été influencé par le film «L’évadé d’Alcatraz», diffusé à la télévision samedi soir en Floride, où il a passé le week-end dans sa résidence de Mar-a-Lago. Donc, pour Donald Trump, la réponse au crime est… une île.
Avec des barreaux rouillés et des récits de requins friands de chair humaine. L’idée est tellement absurde qu’on peut se demander s’il faut en rire ou applaudir l’audace. Il est bon de rappeler que la prison d’Alcatraz a été fermée en 1963, non à cause de problèmes de sécurité ou d’idéologie pénitentiaire, mais parce qu’elle coûtait très cher à maintenir. Alcatraz représentait un gouffre financier sur un rocher flottant. A l’époque, son entretien coûtait trois fois plus qu’un pénitencier classique en raison des coûts inhérents, entre autres, aux matériels et denrées qu’il fallait convoyer régulièrement par bateau (eau, nourriture, carburant, savon…).
Une absurdité administrative devenue un véritable poids pour les contribuables américains. Mais Trump ne se préoccupe guère de ces détails. Ce qu’il veut, c’est du spectacle. La réouverture d'Alcatraz serait, selon lui, un «symbole de loi, d'ordre et de justice». Et d’ajouter que «c'est une sacrée histoire, franchement, alors je pense que nous allons le faire».
Voilà. Son imaginaire a pris le dessus. Certains y verront une nouvelle provocation. D'autres considéreront cela comme un moyen astucieux de détourner l’attention de ses difficultés à expulser massivement les migrants. «Nous allons dépenser un demi-milliard de dollars pour rénover Alcatraz... tout cela parce qu’un vieil homme s’ennuyait et zappait devant la télévision un samedi soir», a ironisé un internaute».
Mais pour Trump, peu importe si le projet est bancal sur les plans légal et économique, d’autant qu’Alcatraz est classée monument historique national, sans aucune structure conforme aux normes modernes. Et cette vision punitive, spectaculaire et coûteuse rappelle d’autres initiatives de l’ex-présentateur de télé-réalité devenu président. Il a également suggéré d’envoyer les immigrants illégaux à la prison de Guantanamo, qu’il estime capable d’accueillir jusqu’à 30.000 personnes. Et il s’illustre aussi en renvoyant des migrants latino-américains des Etats-Unis vers le Cecot, la prison de haute sécurité très controversée du Salvador.
Cependant, au-delà de cette anecdote risible (ou choquante, c’est selon), ce projet ne va ni réduire la récidive ni améliorer le fonctionnement du système carcéral américain. Et il soulève une question importante : Faut-il vraiment ressusciter les fantômes du passé pour cacher les échecs actuels ? Car, Rappelons-le encore une fois, Alcatraz n'a jamais été un succès. Ni sur le plan humain ni du point de vue pénitentiaire. C'était plutôt un symbole. Un symbole d'impuissance et d'inhumanité. En attendant, espérons sincèrement que Trump n'ait pas l'idée de regarder Jurassic Park : il pourrait exiger que l’on clone des dinosaures pour assurer la sécurité des frontières américaines.
Par D. William