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Sahara marocain : Le verrou est chez le voisin

Sahara marocain : Le verrou est chez le voisin

A quelques jours d’un nouveau passage du dossier du Sahara marocain devant le Conseil de sécurité, quelque chose a changé de part et d’autre de l’Atlantique. Le débat, longtemps enlisé dans le confort du statu quo, semble s’être déplacé. 

Il ne s’agit plus de s’interroger si l’autonomie est une option, mais plutôt comment l’inscrire dans une architecture politique stable, acceptable et durable. Le mot d’ordre est venu de Staffan de Mistura.

Lors d’une réunion à huis clos du Conseil de sécurité de l'ONU le 10 octobre, l’Envoyé personnel du Secrétaire général a appelé à «un changement de rythme» et à des «décisions courageuses», au nom du réalisme et du compromis, tout en fixant un horizon : rouvrir des négociations directes d’ici fin 2025 entre le Maroc, l’Algérie, le Front polisario et la Mauritanie. 

C’est l’agence italienne Nova qui livre les détails de cette réunion, décrivant un Staffan de Mistura sorti de sa réserve pour prévenir d’un risque d’escalade au Maghreb si le statu quo perdure. Selon lui, il faut fixer un cap et une méthode, et ce cinquante ans après la Marche verte et alors que le mandat de la Minurso est remis sur la table.

C’est pourquoi le projet de résolution qui circule actuellement consacrerait l’initiative marocaine de 2007 comme «seule base sérieuse, crédible et réaliste» du processus politique.  Il lierait également la durée du mandat de la Minurso à des étapes de négociations resserrées. L’idée n’est pas de fragiliser la Mission, mais d’adosser le suivi onusien à des résultats concrets pour éviter la répétition des reconductions automatiques. 

Dans le même temps, la carte des soutiens s’est réorganisée. Les Etats-Unis, la France, l’Espagne et le Royaume-Uni ne se contentent plus d’un langage de précaution : ils assument l’initiative marocaine d’autonomie comme base «réaliste et pragmatique».

En Afrique, la récente Déclaration de Malabo (Guinée équatoriale), portée par la Communauté économique et monétaire de l’Afrique centrale (CEMAC), entérine la même lecture : l’autonomie est la seule voie qui tient debout, parce qu’elle combine souveraineté nationale, représentativité locale et intégration économique des provinces du Sud. 

A Rabat, on a également une lecture unique : faire de l’autonomie non pas un slogan, mais un cadre politique lisible, tout en multipliant les signaux (infrastructures, investissements étrangers, ouverture de représentations diplomatiques…) qui ancrent les provinces du Sud dans les chaînes de valeur mondiales. 

Fin de l’ambiguïté

Reste l’angle mort : Alger. Le président Abdelmadjid Tebboune persiste à conditionner tout règlement du conflit à un référendum d’autodétermination, formule obsolète que plus personne au Conseil de sécurité ne voit praticable ni juridiquement, ni démographiquement, encore moins techniquement. Il répète que l’Algérie «n’impose rien» et «acceptera ce que les Sahraouis accepteront». Mais chacun sait où se prennent les décisions qui déterminent la ligne du Polisario. 

De Mistura, là encore, a choisi la clarté : Agenzia Nova rapporte qu’il a demandé à Alger d’«aider le Polisario à privilégier la voie politique» et d’abandonner la posture de confrontation. Ce rappel est légitimé par le fait que les accrochages sporadiques dans les zones tampons nourrissent le risque d’un engrenage. La Minurso demeure aujourd’hui l’ultime pare-feu. Raison pour laquelle de Mistura plaide pour son maintien, «même sous un format réduit». 

Dans ce contexte, le coût stratégique du statu quo est plus élevé pour Alger que pour Rabat. Pourquoi ? Parce que la dynamique internationale consolide, mois après mois, la position marocaine : autonomie sous souveraineté. C’est ce que disent, chacun à leur manière, Washington, Paris, Londres, Madrid, ainsi que de nombreux partenaires africains.

La dynamique est donc bien là. Le verrou, lui, est chez le voisin. Plus l’Algérie s’accroche au référendum-totem, plus elle s’isole de la grammaire diplomatique qui s’impose partout ailleurs. Plus elle retarde une négociation quadripartite, plus elle se condamne à discuter demain dans un rapport de forces moins favorable. 

A l’inverse, sa participation pleine et entière à un cycle de discussions crédibles ouvrirait la voie à une sortie par le haut : une solution politique dont elle serait co-auteur, et peut-être enfin la possibilité d’avoir un Maghreb où l'on parlera émergence économique, mobilité, sécurité collective… 

Alger a tout à gagner après un demi-siècle à nourrir les faux débats autour du Sahara marocain et à s’essayer à travestir l’Histoire.

F. Ouriaghli

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