Route impraticable, une boite de conserve sur quartes roues en guise de car et des gens entassés à l’intérieur dont la vie, ne vaut pas plus que le prix du ticket, et au final, 24 familles endeuillées.
Je parle bien ici de l’hécatombe de Demnate qui a eu lieu dans la matinée du 7 août durant laquelle, un véhicule de transport mixte est tombé dans un ravin. Mixte? ça veut dire que pour certains, marchandise, bétail ou humains, c’est à peu près du pareil au même. Une différence de degré et aucunement de nature
Ce triste drame de notre histoire routière et/ou nécrologique, est le pire depuis celui de 2012 qui avait causé la mort de 44 personnes sur une route nationale au sud de Marrakech.
Plus globalement, chaque année, plus de 3000 personnes meurent dans cette guerre des routes qui ne dit pas son nom. En 2022, le chiffre fut de 3.201 selon les données fournies par l’Agence nationale de sécurité routière. Le “chiffre”, et c’est bien là que réside une grande partie du problème. Puisque pour être honnête, j’ai failli écrire 3.200 morts au lieu de 3.201, tout simplement pour arrondir le chiffre. Mais le “1” que j’ai failli occulter pour des raisons de commodité statistique, c’est avant tout une personne, un humain et une famille endeuillée à vie. Un humain, dont la valeur est tout simplement inquantifiable car absolue.
Chaque mort sur nos routes c’est la fin d’un monde, de rêves, de perspectives futures et d’aspirations. Non, ce n’est pas qu’un chiffre et ça ne doit jamais l’être. Mais qu’en est-il dans ce cas de 24? Dans ce cas de figure en effet, il ne s’agit aucunement d’un accident de la nature, d’un volcan ou d’un ouragan, mais d'un accident, dont la responsabilité est éminemment humaine et politique au sens large.
Puisque des routes impraticables comme leur nom l’indique, ne doivent tout simplement pas être pratiquées. Et il revient aux responsables politiques locaux de veiller à ce qu’elles cessent d’être dans cet état mortifère, ou du moins, de militer en tant qu’élus dans ce sens. De même, qu’en est-il du rôle de la gendarmerie? La question reste posée, en attendant les résultats de l’enquête. Car les autorités locales ainsi que la gendarmerie, se sont naturellement déplacées sur les lieux du drame.
Qu’en est-il des élus locaux? Silence radio, du moins de ce que j’en sais. Qu’en est-il de nos ministres et de nos gouvernements? Peut-être que la période de vacances y est pour quelque chose. Effectivement, au-delà de la responsabilité des autorités et des élus locaux, la question se pose aussi au niveau régional puis gouvernemental. Car le principe de subsidiarité implique que ce qui ne peut ou n’a pas été résolu au niveau local, se doit de l’être au niveau régional, et si ce n’est pas le cas, on remonte au niveau gouvernemental. La moindre des choses aurait été qu’un ministre se prononce sur la question. Le ministre du Transport de la Logistique par exemple, le chef du gouvernement ou encore le porte-parole du gouvernement. Puisque ça aurait été rassurant pour la population locale en particulier, de savoir que ce drame va être traité à un niveau politique et gouvernemental, c'est-à-dire à un niveau, qui possède des leviers et des moyens incommensurablement supérieurs à ceux des autorités locales. Car finalement, ce que veulent ces gens, c’est que ce genre de drame ne reproduise plus, que leurs routes deviennent sûres et praticables et surtout que leurs vies, valent autant que celles des habitants des métropoles et grands centres urbains, et plus largement, que celles de n’importe quel autre citoyen marocain qu’il soit riche ou pauvre.
Car de leur côté, les médias ont fait le boulot. Autant les médias marocains qui, les premiers, ont amplement couvert le drame et posé les bonnes questions, que les médias internationaux qui ont donné une dimension mondiale peu glorieuse à cette tragédie. Mais peut-être que tout le monde chez nous, ne voit pas ce qui s’est passé comme une tragédie qui devrait interpeller des responsabilités à différents degrés, mais tout simplement comme un fait divers dont l'écho médiatique, finira par s’estomper avec le temps.
Ce que les gens attendent réellement de nos élus autant locaux que nationaux ainsi que de notre exécutif, c’est non seulement d’être rassurés par une prise de parole officielle, ca serait la moindre des choses, mais de savoir que le problème va être traité à la racine. C’est-à-dire qu'il devienne une question politique, qui englobe tous les drames similaires passés et à venir. Oui, ils ne veulent plus être perçus comme des citoyens de seconde zone, comme des chiffres et des statistiques.
En attendant, les 24 familles endeuillées devront se contenter d'une enquête, en attendant peut-être la fin des vacances de nos ministres, en espérant que d’ici-là, un autre drame ne vienne faire oublier celui-ci.