D’un post sur Truth Social, Donald Trump a rallumé la mèche d’une guerre commerciale que l’on croyait provisoirement éteinte. L’Union européenne se retrouve menacée de droits de douane fixés à 50% sur ses exportations vers les Etats-Unis à partir du 1er juin.
Que reproche donc Trump à l’Europe ? A peu près tout. Selon lui, l’Union aurait été «conçue pour faire du mal aux Etats-Unis». En d’autres termes, pour siphonner les richesses américaines.
L’argument n’est pas neuf. Déjà, en 2018, sous son premier mandat, il s’en était pris aux excédents commerciaux allemands ou encore aux voitures européennes jugées trop bon marché.
Il revient donc à la charge, estimant que le déficit commercial des Etats-Unis dans les échanges bilatéraux avec l'Europe est de 300 à 350 milliards de dollars. Ce qui, selon lui, est une injustice à réparer. Or, les données du représentant de la Maison Blanche au Commerce (USTR) font état d’un déficit commercial de 235 milliards de dollars en 2024. Sauf que tous ces chiffres sont vivement contestés par la Commission européenne, qui estime ce déficit à environ 160 milliards de dollars pour les biens, et à 50 milliards d'euros en tenant compte de l'excédent commercial américain sur les services vis-à-vis de l’Europe.
Mais Trump n’en démord pas et reste ferme sur sa position. Bluff ? Tactique de négociation ? Cherche-t-il vraiment un accord commercial ? Pas vraiment. Il le dit lui-même : «Nous ne cherchons pas d’accord». Le but est ailleurs : faire pression et montrer les muscles. Et ce, alors que les négociations entre les deux parties piétinent.
En effet, l’Europe, qui appelle au «respect», à la «bonne foi» et à la «désescalade», est «prête à un accord équilibré», selon son commissaire au Commerce, Maros Sefcovic. C’est pourquoi elle propose une baisse mutuelle des droits de douane. De son côté, Washington exige davantage, y compris sur la taxation numérique.
Inquiétude
Les gouvernements européens appellent à l’apaisement, mais tous savent qu’il faudra, à un moment et en cas de désaccord, réagir. La Commission européenne a déjà préparé une liste de produits américains susceptibles d’être surtaxés à hauteur de 95 milliards d’euros : avions, voitures, whisky… Tout y passe.
Mais le plus difficile pour l’UE n’est pas de riposter. C’est de parler d’une seule voix. Ce qui est d’autant plus difficile que les intérêts sont divergents.
En tout cas, les effets concrets de ce bras de fer pourraient vite se faire sentir. Une guerre commerciale prolongée entre les deux plus grands blocs économiques de la planète ? Cela signifie des échanges ralentis, des chaînes d’approvisionnement bousculées, une inflation importée et, à terme, une croissance affaiblie des deux côtés de l’Atlantique. Ce qui n’est dans l’intérêt de personne.
A quoi s’attendre alors ? Avec Donald Trump, tout est possible. Peut-être assisterons-nous le 1er juin à un spectaculaire retournement, comme en 2018. C’est-à-dire un accord de dernière minute, assorti d’un discours triomphal sur le perron de la Maison Blanche. Ou bien à un nouveau cycle d’une guerre commerciale qui inquiète le monde des affaires.
Une inquiétude qui n’épargne pas non plus les fabricants de smartphones, Apple en premier. D’autant que Trump exige que tous les iPhones vendus aux Etats-Unis soient fabriqués… aux Etats-Unis.
Sinon, c’est 25% de droits de douane en plus. Et tant qu’à faire, pourquoi ne pas inclure les autres fabricants dans le lot ? Car, comme dirait le président, «sinon, ce ne serait pas juste».
Problème : le rêve du président américain d’une relocalisation industrielle massive se heurte à la réalité technique.
Apple, déjà partiellement installée en Inde, ne pourrait pas du jour au lendemain délocaliser toute sa chaîne de valeur aux USA. Les analystes estiment qu’une telle opération prendrait entre cinq et dix ans. Et le prix d’un iPhone fabriqué aux Etats-Unis ? Environ 3.500 dollars.
F. Ouriaghli